David Van Deusen, Xaviar Massot
Les Dossiers Black Bloc
Chapitre I, Section I
L’Émergence du Black Bloc : Histoire, Tactiques et Constitution Générale
On peut remonter aux racines historiques du Black Bloc à partir de quand et où des personnes incluant une classe opprimée ou un groupe se soulève de manière militante contre ses oppresseurs. Des éléments de tactiques propres au Bloc ont été utilisés auparavant par la faction du Weather ou des Students for a Democratic Society (le SDS) en Amérique du Nord pendant les « Days of Rage » en 1969.[1] Plus précisément, la tactique esthétique et des méthodes plus élaborées de confrontation avec l’État ont commencé à faire leur apparition dans le mouvement Autonome en Allemagne dans les années 1980. Là, l’âpreté du mouvement anti-nucléaire aussi bien que les revendications du mouvement anarchiste/anti-fasciste de longue date exigeaient que les manifestations de masse soient portées à un haut degré de militantisme et d’unanimité. Par conséquent, des collectifs radicaux – souvent issus de la scène anarcho-punk et composés typiquement de membres de la classe ouvrière— commencèrent à inciter leurs membres et les militants sociaux à se rassembler dans les manifestations vêtus de noir (avec des masques) et de marcher comme un groupe de manifestants unis (parmi beaucoup d’autres). Avec leur identité efficacement dissimulée dans une uniformité temporaire, ils étaient à même d’orienter avec plus de réussite les actions de protestation dans des directions plus radicales tout en se protégeant contre une identification en vue d’une répression étatique directe ou des mises en examen ultérieures, ou les deux. Ce procédé a mûri au point où le Black Bloc naissant a commencé à mettre en place des tactiques d’auto-défense et militantes plus élaborées. Il faut comprendre que cette élaboration n‘a pas marqué la naissance d’une organisation formelle ou permanente. Elle a seulement fonctionné comme regroupement cohésif ponctuel avec pour objectif immédiat la création d’un contingent temporaire d’une force combattante de rue, qui se dissoudra en pratique avec la conclusion de l’action particulière. Cela ne signifie pas que le seul objectif des personnes et/ou collectifs concernés se résume à une action. Au contraire, celles et ceux qui constituaient communément le Bloc étaient engagés dans des organisations politiques et sociales et dans des projets que portaient les particularités de leurs communautés locales. Ils avaient leurs racines.[2] De plus, le militantisme et les actions du Black Bloc qu’elles entrainent doivent être compris comme l’incarnation d’une certaine façon de lutter parmi d’autres, une manière à la fois efficace et légitime.[3]
Comme Black Bloc, ce regroupement constituait une alliance de personnes indépendantes et/ou de groupes d’affinité. Collectivement, le Bloc agissait par des méthodes de démocratie directe aussi souvent que possible, et par consensus interne au groupe d’affinité quand la situation l’exigeait. A part cela, le groupement évitait volontairement toute structure formelle ou hiérarchie autoritaire.
De manière générale, le Bloc prenait position devant, à l’arrière ou sur le périmètre de la manifestation, de manière à assurer une forte présence défensive sur des points habituellement vulnérables. De cette façon, la police était empêchée de perturber le déroulement de la manifestation sans avoir au préalable affrontée une section militante, décidée et entrainée. Afin de renforcer sa capacité à atteindre ces objectifs tactiques, le Bloc a commencé à s’équiper de barres de fer, de battes en bois, et à porter des vêtements de protection et des casques. En outre, d’autre perfectionnements tactiques comprenaient l’usage de longues bannières, de perches ou de cordes délimitant le périmètre du groupe. Le but était de rendre plus difficile à la police d’isoler des individus pour les arrêter. Les flics devaient traverser une barrière tenue collectivement, tout en affrontant des coups de battes, afin de procéder aux arrestations.
Plus que d’agir comme troupes de choc ou d’unités défensives au sein de manifestations plus larges, le Bloc a commencé à jouer un rôle offensif en ce qui concerne la destruction délibérée de biens privés capitalistes. Dans ce cas, les groupes d’affinité au sein du Bloc facilitaient le bris de vitrines, l’inscription à la peinture de slogans révolutionnaires et la destruction des véhicules militaires ou de la police. Bien évidemment, toutes ces actions étaient clairement dirigées contre des cibles capitalistes. Contrairement aux assertions des médias institutionnels, le vandalisme arbitraire n’a jamais été, n’est jamais, le but des pratiques du Black Bloc.
Une autre fonction du Black Bloc est d’orienter la manifestation en cours vers une direction plus militante et globale socialement. En général, cela se faisait par le positionnement du Bloc à l’avant de la manifestation, obligeant ainsi à l’escalade entre les forces de police et les manifestants. Le Bloc s’assurait d’une telle escalade s’ensuivrait en résistant simplement aux arrestations, en refusant de rester sur les trajets autorisés pour la parade, en ne respectant pas les barrières placées par la police, et en dirigeant sa colère contre des cibles capitalistes.
Le but d’une telle escalade repose en partie sur la croyance que un tel conflit entraine nécessairement de démasquer la nature brutale de l’État. La brutalité subséquente de la force policière/militaire d’en face est révélée . L’idée est que, en démontrant à une population plus large les méthodes violentes avec lesquelles le status quo est maintenu, un nombre significatif de personnes se radicalisera plus avant à travers cette démonstration visuelle et physique. L’escalade a également un effet désiré d’obliger une action à transcender ses fondations souvent libérales et à devenir un réel exemple de révolte contextuellement conditionnée. L’ action directe s’étend au-delà du simple symbolisme et plonge alors dans le vrai territoire de l’ insurrection révolutionnaire subjective et objective. La manifestation commence ainsi à assumer sa propre identité libérée du spectacle social de la culture marchandisée-consommateur et commence à se mouvoir de manière plus fluide et inventive. Le rôle de la manifestation, comme soupape des tensions sociales, à la fois impuissante et non-révolutionnaire, commence à s’inverser en une expression réelle d’agitation sociale. Sous cet angle, la spontanéité, via le militantisme et la violence, devient l’expression réelle de l’action de masse. Ainsi, l’action devient un moyen librement choisi à travers lequel l’identité humaine naturelle se manifeste par son rejet viscérale de la soumission, de l’autorité du capitalisme et du status quo.
Cette fonction de clash social est nécessaire en ce qu’il permet aux individus opprimés et aliénés une réelle expérience où l’on est réprimée et où l’identité moutonnière et l’ennui sont brisés par une situation de révolte. A ce moment, l’individu commence à ressentir la réalité future, que les rues et la ville, comme création du travailleur, lui appartiennent vraiment. Alors, les possibilités d’une révolte totale et de la victoire se cristallisent à travers l’adrénaline de l’affrontement. En clair, cet affrontement est salutaire en ce qu’il permet à l’esprit de comprendre la vraie lutte physique, tout en permettant aussi de ressentir, même furtivement, la possibilité d’une autogestion collective débarrassée de la vague abstraction de la police et du gouvernement. La ville, dans le cadre de l’affrontement, devient vraiment celle que le peuple peut gagner, perdre, tenir ou abandonner.
Pour paraphraser Jean Paul Sartre, « La raison pour laquelle les travailleurs ne se révoltent pas …c’est parce qu’ils ne s’imaginent pas à quoi ressemblerait une société libérée. » Ou encore l’anarchiste Michel Bakounine, « Souvenons-nous, aucun pas en avant dans l’histoire ne s’est jamais concrétisé sans être auparavant baptisé dans le sang. »
Par conséquent, indépendamment du succès particulier d’une action donnée, l’action des membres du Black Bloc doit être encouragée et comprise à la fois comme nécessaire et positive en ce qui concerne l’avancement continuel de la lutte révolutionnaire anarchiste.[4]
La pratique de tels Blocs sont aussi socialement/psychologiquement saine qu’elle est réelle. A ce titre, les personnes qui se revendiquent de gauche, ou même anarchistes, et qui argumentent contre le besoin d’un Black Bloc, ou que le Bloc est socialement et/ou tactiquement inefficace, doivent être considéré comme n’ayant pas compris la dynamique subjective de la révolte, ou comme si accablées par l’indécision et l’acceptation tacite du status quo, et comme ignorantes au mieux, ou comme ennemies au pire. Ces personnes remplacerait l’action réelle par une autre génération de débats, de réunions et d’ennui.[5] En dépit de leurs buts déclarés, elles deviennent les messagers de la défaite et de l’aliénation du fait de leur incapacité à concevoir le risque, l’action, le mouvement et l’expérience de la liberté. Les révolutionnaires feraient donc bien de discréditer leur discours à travers l’action et, comme nous ne sommes pas des néandertaliens assoiffés de sang, l’élaboration continuelle de la théorie anarchiste légitime.
Suivant l’exemple des allemands, la formation de Black Blocs s’est répandue bientôt à travers l’Europe, où il sont encore aujourd’hui en activité avec une relative intensité et efficacité.[6] Au début des années 1990, ces tactiques commencèrent à s’implanter en Amérique du Nord. Des Black Blocs furent organisés durant la Guerre du Golfe en 1991, lors de la Convention Nationale Démocrate en 1996, et dans une multitude d’autres manifestations tout au long de la décennie.
Cependant, l’efficacité du Black Bloc en Amérique du Nord semble seulement atteindre un certain niveau de maturité avec cette nouvelle décennie ; une maturité qui va de paire avec celle du mouvement de protestation sociale dans son ensemble.
Pendant la Bataille de Seattle,[7] le Black Bloc (approximativement au nombre de 200) a d’abord focalisé son attention sur la destruction de biens d’entreprises. Lors de l’action A16 (16 avril 2000),[8] le Bloc ( 1 000 à peu près) a consacré l’essentiel de son énergie à combattre la police engagée dans des actes violents contre lui-même comme contre les manifestants non-violents. Les Black Blocs étaient aussi présents aux Conventions Nationales Démocrates et Républicaines cette année-là.[9] Là, ils montrèrent à nouveau leurs tactiques d’auto-défense et de destruction de biens privés capitalistes et ou d’État (ex. des voitures de police). Des Blocs étaient présents à une multitude de manifestations le Premier Mai en 2000, au premier débat des élections présidentielles à Boston,[10] à l’investiture du Président Bush,[11] ainsi qu’à un certain nombre d’autres évènements.
Les particularités de chacune de ces actions ont entrainé une variété de tactiques. Ces différences méritent d’être évaluées afin d’établir quelles tactiques précises sont efficaces dans certaines situations. Une telle analyse est nécessaire pour que nous puissions mieux nous préparer aux confrontations futures. Ce n’est cependant pas le but de cet essai que d’entrer dans les détails. L’intérêt premier est seulement d’examiner l’histoire du Black Bloc et de la situer dans un contexte social plus large. Ces particularités, par conséquent, bien qu’importantes, ne seront pas abordées pour l’instant afin de rester concentré sur le sujet actuel. Je vais donc revenir sur les origines sociales du Black Bloc nord-américain.
Composition Sociale du Black Bloc Nord-Américain
Le Black Bloc en Amérique du Nord, principalement composé d’individus issus de la contre-culture contemporaine, et le plus souvent venant d’un milieu ouvrier, est une expression politique du développement de la conscience de classe.[12] Les personnes et les collectifs constituant le Black Bloc peuvent être généralement décrits comme une jeunesse semi-aliénée, issue d’un milieu pauvre et déclassé ou ouvrier. Ce n’est pas pour insinuer qu’un nombre de participants au Bloc ne viennent pas des classes supérieures, ils existent. Néanmoins, avant que quelqu’un ne crie ‘charlatans’, il faut souligner qu’à l’époque actuelle du néo-libéralisme (le mode contemporain du capitalisme), les formes d’aliénations se développent même en dehors des milieux les plus opprimés. D’un autre côté, je n’ai pas l’intention d’insinuer que le noyau naturel révolutionnaire exclut les populations les plus exploitées et dépossédées matériellement. Ce n’est pas le cas. Je dis seulement que, comme la société évolue dans des directions plus abstraites et culturellement indésirables, de plus en plus d’individus au-delà des classes sociales, en particuliers les jeunes, commenceront à chercher des alternatives sociales au status quo. Et il est raisonnable de s’attendre à ce que un certain nombre d’entre elles adopte la vision sociale de la classe ouvrière et défavorisée activement révolutionnaire. D’ailleurs, l’histoire a prouvé que si l’origine de classe peut nous apprendre beaucoup sur le potentiel général et la conduite de grands groupes, elle nous dit aussi que ces généralités ne constituent pas des lois absolues lorsqu’elles s’adressent aux actions concrètes d’individus spécifiques.[13] Par exemple, l’un des plus grands révolutionnaires/théoriciens anarchistes de l’histoire, Michel Bakounine. Il était issu d’une famille aristocratique russe. Lui-même fut brièvement officier dans l’armée impériale. Il s’est néanmoins engagé durant toute sa vie adulte en faveur de l’émancipation du peuple. Il s’est tenu sur les barricades ouvrières pendant l’insurrection bavaroise, et, pour cette raison, ses origines de classe ont été à la fois dépassées et sont devenues insignifiantes. Donnez-nous dix divisions de Bakounine, quelle que soit leur condition économique passée, et notre tâche révolutionnaire sera terminée dans un délai de quelques jours. Alors, face à toutes vos critiques prétentieuses concernant les classes sociales, je vous mets au défi de dire ce que vous avez réalisé, vous.
Ceci étant clarifié, j’utilise le préfixe ‘semi,’ pour décrire les participants aux Blocs comme‘jeunesse semi aliénée,’ pour souligner le fait que la vaste majorité d’entre elle est enracinée dans des communautés contre-culturelles au sein desquelles un degré de non-aliénation sociale est naturellement facilité. Ils peuvent faire partie d’une petite coopérative démocratique ouvrière , un collectif à vocation artistique basé sur le consensus, résider dans une communauté, une maison, un squat, gérés collectivement, subsister de fonds nets d’impôt issus du marché noir, ou tout simplement vivre comme les incitent à le faire leur logique anti-capitaliste et leur intuition. Autrement dit, une grande partie de leur temps est centré sur l’exemple concret d’une vie/créativité plus naturelle selon des modes d’existence socialistes. Ils essaient d’être des types biens les uns envers les autres et avec les personnes défavorisés et les travailleurs autour d’eux. Ils s’entraident sans en attendre un quelconque profit.
Cela ne signifie pas, cependant, qu’ils ne sont pas aliénés, contrairement aux ouvriers ordinaires. Car, tout aussi « anti » que vous soyez en vivant dans une société autoritaire répressive, vous n’échappez pas à l’intoxication de l’esprit par le biais de l’État. Si l’on vit dans une ferme collective, cette communauté est néanmoins contrainte à payer des taxes foncières, ou la terre sera saisie. Si l’on passe son temps à travailler collectivement à une œuvre artistique libératoire, il faut disposer du matériel artistique, d’un abri et de nourriture ; et il y a souvent assez de cohésion pour inciter quelques-uns à vendre leur travail comme esclaves salariés. Les travailleurs des coopératives ne font pas exception. De tels comportements sont obligés de continuer à fonctionner sur des bases de trésorerie, dans la mesure ou certaines fournitures nécessaires (la peinture, par exemple, si la coopérative ne se consacre pas à ce commerce) ne peuvent pas être acquises facilement par le troc ou autres moyens. Ceci étant dit, on sent l’odeur du capitalisme contemporain dans les meilleures maisons. Certaines sentent beaucoup plus que d’autres.
Néanmoins, un anarchiste au sein d’une contreculture est moins aliéné , vis à vis de lui-même et des autres, comparé aux personnes immergées entièrement dans la culture dominante. Dans ce cas, au moins, la marchandisation à outrance, le consumérisme, le capitalisme et l’autoritarisme sont considérés comme des conneries à abolir et non comme base d’une reconnaissance sociale. Une fois compris cela, la question des raisons sociales, politiques et historiques plus profondes de l’émergence de cette faction révolutionnaire dans les nations occidentales, demeure. Car les particularités de ses tendances culturelles la rend quelque peu unique comparée à ses ancêtres prolétaires. Elle n’est pas avenante avec l’analyse autoritaire des différents partis communistes, n’est pas souvent motivée par la faim (on peut trouver une quantité de nourriture dans les poubelles de l’Oncle Sam) et elle ne limite pas ses revendications et sa vision sociale à l’égalité matérielle. Elle appelle à repenser et à réorganiser la société selon des lignes qui remettent en cause les fondements mêmes de la civilisation occidentale. Elle est anarchiste ! Mais comment le contexte social lui a t’il donné naissance ? Quelle est sa composition ? Que cherche – t’ elle exactement à abolir et par quoi a t ‘elle l’intention de le remplacer ?
Afin de répondre à quelques-unes de ces questions, et de resituer le Black Bloc dans un contexte sociologique plus large, je vais maintenant étudier les particularités de la réalité capitaliste actuelle.
Pour citer un membre du Comité Central de Coordination du Weather, Jeff Jones, ‘Nous pension que nous avions atteint un degré de militantisme que nous ne pourrions pas dépasser en utilisant des tactiques de terrain. De plus, l’absence de mobilisation populaire après l’assassinat du Black Panther, Fred Hampton, nous a convaincu que notre rôle politique serait durable et efficace qu’à la condition d’opérer comme une sorte de guérilla, clandestine, derrière les lignes ennemies.’ (info rassemblée suite à un entretien privé avec lui à l’hiver 1997)
A partir de là, l’organisation a rapidement décidé de poursuivre ses activités clandestinement comme organisation de guérrilla urbaine. Pour ces raisons, les Days Of Rage doivent être interprétés comme rien de plus qu’un prototype primitif des actions du Black Bloc contemporain.
Pour un compte-rendu objectif de cette action voir Albert (ed.), The Sixties Papers. Shin’ya ono : You Don’t Need A Weatherman, Pages 254–263, Praeger, New York, 1984
Ce paragraphe ne signifie pas que chaque Black Bloc doit être violent ou destructeur par définition. En fait, il est des moment où le Bloc décide volontairement de ne pas se conduire de cette manière à moins que les circonstances ne l’y obligent. Lors de ces moment, le Bloc est seulement présent pour montrer la solidarité du mouvement dans une certaine situation sociale. Néanmoins, même sans utiliser de tels moyens, le Bloc agit encore comme représentation d’une certaine menace, possibilité et idée. Le Bloc, par ses relations de personne à personne, représente la liberté et l’esprit humain affranchi incarnés dans une forme social donnée.
[1] Durant cette action, environ 600 jeunes communistes ont convergé vers Chicago pour protester contre le procès des « 8 de Chicago » et contre la continuation de la guerre du Vietnam. Leur méthode de confrontation était l’affrontement physique direct avec les forces de l’Etat (dans ce cas, la police). Ils s’organisèrent en petits groupes d’affinité , équipés de battes de bois, casques, pavés et autres moyens de basse technologie pour le combat en face à face. Une fois rassemblés, ils attaquèrent avec virulence les rangs de la police . Bien que la première journée fut la plus efficace (en termes de blessures infligées à l’ennemi et en destruction matérielle de propriétés privées capitalistes), trois journées de confrontations limitées suivirent. Bien que cette action fasse clairement le lien entre le Bloc actuel et les tactiques militantes passées, elle diffère par de nombreux aspects. Ils ont utilisé une chaîne de commandement incompatible avec les procédés de démocratie directe. Deuxièmement, leur action s’est déroulé sans l’avantage de faire partie d’une action de protestation plus large et plus diverse tactiquement. Pour cette raison, la police put focaliser tous ses moyens supérieurs exclusivement contre eux. Troisièmement, après l’action, la direction du Weather ne pensait pas qu’une telle forme de protestation puisse se répéter sans entrainer un bain de sang contre-productif (durant la première nuit d’affrontements, 10 membres du Weather ont été blessés par balles de fusils et un autre de révolver).
[2] Une telle activité au niveau local est à 100% nécessaire dans le mouvement en cours vers la révolution sociale.
[3] Il est ici nécessaire de comprendre qu’à ce stade de la lutte, les tactiques employées par le Bloc sont plus efficaces lorsqu’elles le sont en parallèle avec d’autres. Cela inclut les blocus non-violents, le théâtre de rue, les manifestations ‘légales’, etc.. De plus, il faut aussi expliciter que de telles actions, lorsqu’elles sont utilisées en parallèle avec des tactiques plus militantes, sont efficaces et légitimes. Enfin, il faut noter que de nombreux anarchistes s’impliquent également dans de telles actions.
[4] Cela ne signifie pas que nous ne devons pas nous sentir concernés par le fait d’atteindre certains objectifs concernant des actions précises. Nous devons rechercher une efficacité optimale en affinant nos capacités tactiques et notre persévérance subjective. Cependant, même lorsque certains objectifs ne sont pas atteints, nous pouvons souvent crier victoire parce que cette forme d’action direct se traduit en avancées subjectives. Un bon exemple en est l’action du A16 où nous avons échoué à faire capoter la réunion capitaliste mais où nous avons réalisé des avancées psychologiques grâce à nos capacités démontrées de lutter contre les forces étatiques. Pour résumer, chaque action qui implique le mouvement anarchiste révolutionnaire est porteuse d’une pléthore de victoires et de défaites potentielles, au-delà du seul objectif déclaré sur le moment. Comme révolutionnaires contre l’ennui et l’aliénation, nos fins et nos moyens s’amalgament dans une manifestation naturelle continue du processus de démocratie directe et de lutte .
[5] Cela ne signifie pas que le débat, les réunions d’organisation et autres activités du genre ne sont pas nécessaires. Bien au contraire. Cependant, elles ne sont pas souhaitables et utiles lorsqu’elles commencent à devenir une fin en elle-même. C’est une tendance que l’on retrouve souvent dans les organisations « gauchistes » en vertu de ses membres libéraux à la recherche d’un moyen pour se sentir mieux dans leur vie et leur style de vie implicitement oppressifs et se positionnant dans les faits comme des consommateurs bien nourris (ex. leur relative stabilité sociale) mis en danger par le fait de préconiser ou de participer à l’action directe révolutionnaire. Il faut se souvenir qu’il y a toujours une telle hésitation et un fétichisme du status quo à gauche, encouragé par l’État pour stabiliser des situations révolutionnaires (par ex. le parti communiste en France en 1968, le NAACP pendant la révolte noire dans les villes américaines la même année).
[6] On peut trouver deux exemples récents dans dans les actions de Prague contre les réunions de la Banque Mondiale/FMI commencées le 26 septembre 2000, et les actions à Nice contre les réunions de l’Union Européenne des 6–7 décembre 2000.
[7] Manifestation contre la réunion de l’Organisation Mondiale du Travail, Seattle, Novembre 1999.
[8] Pour protester contre la réunion de la Banque Mondiale, Washington DC, 16 et 17 Avril 2000.
[9] La Convention Nationale Démocrate s’est tenue à Los Angeles, Californie, du 14 au 17 août 2000. La Convention Nationale Républicaine, à Philadelphie, Pennsylvanie, du 1 au 3 août 2000.
[10] Cambridge, Massachusetts, 3 Octobre 2000.
[11] Washington, DC, 20 janvier 2001.
[12] Bien sûr, il n’est pas sous-entendu ici que c’est la seule, ni même la plus importante, des modes d’expressions politiques. Il ne s’agit que d’une parmi une multitude d’autres.
[13] Pour n’en nommer que deux : Michel Bakounine et Karl Marx.