Fionnghuala Nic Roibeaird
Une introduction élémentaire à l'Anarcha-féminisme
L’anarchisme est l’idée que nul-le n’est plus qualifié-e que vous ne l’êtes pour déterminer votre propre vie et que vous devriez avoir une auto-détermination. C’est la conviction que les structures de pouvoir sont oppressives et que nous ne serons libres qu’avec l’abolition du pouvoir. Il n’y a pas de but final puisqu’il y aura toujours des dynamiques de pouvoir dans nos vies qui nécessiteront d’être abordées et abolies afin de parvenir à une société exempte de coercition, basée sur la communauté et fonctionnant sur les principes de la démocratie directe. L’anarcha-féminisme est l’application de ces politiques anarchistes à la théorie Black Feminist de l’intersectionnalité.
L’anarchisme est l’idée que nul·le n’est plus qualifié·e que vous ne l’êtes pour déterminer votre propre vie et que vous devriez avoir une auto-détermination.
L’intersectionnalité est l’idée que l’ensemble de nos oppressions individuelles (i.e. classe, genre, race, sexualité, (in)/validité) s’entrecroisent et se renforcent mutuellement dans notre oppression ; par exemple, une femme prolétaire est opprimée dans cette société mais une femme noire prolétaire est davantage encore opprimée.
L’intersectionnalité n’a pas vocation à être utilisée comme une excuse pour entrer dans les « Olympiques de l’Oppression », mais plutôt à servir de prisme à travers lequel nous pouvons examiner les différents types d’oppressions et comprendre que chaque oppression individuelle n’est pas isolée ; elle a besoin de l’appui d’autres oppressions ou structures oppressives pour subsister.
L’anarcha-féminisme est l’application de ces politiques anarchistes à la théorie Black Feminist de l’intersectionnalité.
On peut considérer notre société actuelle (suprémaciste blanche, capitaliste, validiste, hétéro-patriarcale) comme étant une pelote de laine et les brins de fil individuels comme étant le capitalisme, le racisme, le sexisme, l’homophobie, le validisme, etc. Ces morceaux de fil, ou structures oppressives, n’existent pas isolément pour créer la pelote de laine ; et en reconnaissant ce fait ainsi qu’en allant plus loin dans l’identification de où et comment elles s’entrecroisent, nous bénéficions d’une meilleure compréhension du pouvoir et de comment le détruire.
Le féminisme dans sa forme la plus fondamentale doit être anti-capitaliste. En examinant et en luttant contre les rôles genrés patriarcaux qui nous sont assignés en tant que femmes il est important de se demander d’où viennent ces rôles et quels intérêts servent-ils ? Le genre est la division capitaliste du travail, c’est une construction sociale ; il n’est pas basé sur le sexe anatomique (puisque le sexe anatomique et le genre ne s’accordent pas toujours), il est basé sur une oppression. Entretenir la croyance patriarcale selon laquelle les hommes sont biologiquement faits pour dominer les femmes a autant de sens que croire que les classes supérieures ou les élites sociales sont faites pour dominer le reste de l’humanité.
par exemple, une femme prolétaire est opprimée dans cette société mais une femme noire prolétaire est davantage encore opprimée.
Certains travaux ont facilité ces rôles genrés patriarcaux ; le travail des hommes était à l’extérieur de la maison et était généralement rémunéré, tandis que le travail des femmes (tâches ménagères, soins, etc.), n’était pas considéré comme du travail, et de fait n’était pas rémunéré. Au contraire, il était du devoir de toutes les femmes de faire la cuisine, la vaisselle, de se reproduire et élever les enfants. Le travail de reproduction est nécessaire à une société capitaliste, le conserver non-rémunéré est nécessaire à la continuité de son existence. Le Capital n’a pas les moyens de rémunérer le travail de reproduction mais se battre pour la rémunération du travail de reproduction n’est pas une voie qui mène à la libération. Lutter contre les rôles genrés qui nous sont assignés et contre les structures de pouvoir qui existent à l’intérieur de la classe travailleuse, en revanche, est un chemin vers la libération.
En définitive, les classes sont une problématique féministe. Les femmes sont démesurément plus pauvres que les hommes, et les femmes non-blanches plus pauvres encore. Les effets dévastateurs du capitalisme ne sont pas non plus étrangers aux mères célibataires. En moyenne, autour du globe, les femmes continuent d’être payées moins, y compris celles qui font exactement le même travail que leurs équivalents masculins. Sans compter que l’argent c’est le pouvoir, et que ceux qui ont le pouvoir sont généralement des hommes.
Le mouvement anarcha-féministe ne veut pas imiter les structures de pouvoir patriarcales actuelles, nous cherchons plutôt à les détruire.
L’anarchisme est contre l’autorité injuste et le féminisme considère la famille nucléaire comme étant le fondement de tous les systèmes autoritaires : le père contrôle sa femme/partenaire et ses enfants, le patron contrôle le père, le gouvernement contrôle le patron. Les enfants sont éduqués à connaître leur place, et non à remettre cette place en question.
L’État est un système autoritaire ; il est une institution exploitante, oppressive, patriarcale et dominée par des hommes. L’État, quelque soit sa forme, est fondé sur l’esclavage, la violence, les mensonges, la traîtrise et la duperie – et toutes ces choses doivent être utilisées pour le maintenir. Très clairement, l’État est ce qu’il est : le défenseur du vieux privilège / créateur du nouveau privilège et un moyen d’exploiter les masses. Il doit également créer certains antagonismes sociaux artificiels afin de justifier sa propre existence. La création d’un nouvel État nécessiterait un nouveau groupe de personnes privilégiées ou une nouvelle classe privilégiée, dont la fonction serait de maintenir sa domination.
On ne peut “élire” la révolution : ainsi que le dit Kropotkine, “l’organisation étatique, qui est la force par laquelle les minorités ont choisi d’établir et d’organiser leur pouvoir sur les masses, ne peut pas être la force qui servira à détruire les privilèges”. La révolution doit être réellement libératrice, cela ne peut se faire que par le biais d’organisations révolutionnaires ascendantes et non-hiérarchiques. La participation féminine dans ces mêmes institutions pourries qui existent actuellement n’éradiquera pas le sexisme, cela assurera seulement plus avant l’oppression et la domination. Le mouvement anarcha-féministe ne veut pas imiter les structures de pouvoir patriarcales actuelles, nous cherchons plutôt à les détruire.
Il apparaît que le féminisme doit être anarchiste ; le féminisme par nature veut démanteler les structures de pouvoir du patriarcat, mais comme nous l’avons précédemment établi, ces structures de pouvoir oppressives ne sont pas indépendantes. Nous ne pouvons être libres qu’avec l’abolition du pouvoir, ainsi donc nous ne pouvons sélectionner et choisir quelles structures de pouvoir nous aimons et lesquelles nous n’aimons pas puisqu’elles travaillent toutes ensemble pour se renforcer l’une l’autre ; l’une ne peut disparaître seule, elles doivent disparaître ensemble.