Claudia et Stefano, Alfredo Cospito, Gioacchino Somma
Déclarations au procès de l’op. Scripta Manent
Déclaration de Claudia et Stefano — Déclaration d’Alfredo Cospito — Au tribunal de Turin [Déclaration de Gioacchino Somma]
Déclaration de Claudia et Stefano
Nous nous trouvons face à vous pour être jugés. Coupables ou innocents ? Mais quelle est l’accusation contre nous ? Dans les milliers de pages que la procureur a produit on trouve vingt ans d’histoire de la lutte anarchiste en Italie et pas seulement. On parle de faits spécifiques pour donner un peu de valeurs aux suppositions et aux conjectures, mais cette montagne de papiers, en réalité, de quoi veut-elle nous convaincre ? Elle veut nous convaincre que nous sommes anarchistes. Que nous n’acceptons pas passivement le système qui nous gouverne, l’inéluctabilité de la domination de l’homme sur l’homme et de l’homme sur la nature. Elle vous demande de condamner l’amour qui unit des êtres humains liés par le même mépris pour l’autorité et qui partagent l’implacable désir de liberté. Si c’est pour cela que nous sommes ici, mettons tout de suite fin à cette farce avant qu’elle ne commence. Nous sommes coupables.
Nous sommes coupables d’être conscients que le régime démocratique n’est pas autre chose que l’impitoyable suprématie des plus forts sur les plus faibles, régime qui se renforce en pulvérisant des particules de pouvoir pour satisfaire l’ego de tout être humain éduqué à la recherche du privilège, dans l’aplatissement des attitudes individuelles, en cherchant protection dans le consensus des masses.
Nous sommes coupables de ne pas accepter ces conditions, de ne pas vouloir participer à la distribution de ces pastilles de pouvoir, de ne pas vouloir vivre sur le sang et la sueur de ceux qui subissent une condition moins avantageuse que la nôtre. Cela ne signifie pas que nous nous laissons confiner dans un coin, dévoués au sacrifice pour vivre au côté des plus faibles. Nous vivons pour nous-mêmes, pour satisfaire pleinement nos exigences sans attendre ou demander le permis, luttant contre tout ce qui nous en empêche. Nous ne rêvons pas d’une révolution mais nous alimentons la révolte perpétuelle contre tout contrainte, transgressant nos limites et celles qui nous sont imposées.
Il y a quelques jours notre fils étaient en train d’étudier à l’école quelque chose que l’on appelle « éducation civique », et répétait à voix haute les principes de la constitution qui garantissent la liberté de parole et d’expression etc. Tout en l’ayant jeté consciemment dans le ventre de la bête en le confrontant à l’instruction publique, le confiant à son intelligence et à l’esprit critique qu’il sera capable de développer, je n’ai pas pu me retenir d’intervenir en lui expliquant que tout ceci est un mensonge, que les lois sont dictées par ceux qui les conçoivent pour maintenir leur pouvoir et qu’il n’est pas vrai que chacun peut exprimer son opinion, parce que si cette opinion leur fait obstacle ceux qui l’expriment seront écrasés, comme cela arrive à sa mère et à son père.
Pour cette raison, pour que ce mensonge ne soit pas perpétré, nous continuerons à lutter à tête haute pour que les générations futures puissent avoir une lecture différente de la réalité et qu’ils ne restent pas otages d’une vérité intéressée.
Nous avons décidé de lire ce document pour vous mettre face à la responsabilité de défendre l’hypocrisie de la constitution sur laquelle vous avez prêté serment. Nous voulons que vous voyiez la main du monstre qui vous caresse la tête comme de fidèles toutous chaque fois que vous vous regardez dans le miroir. Nous ne voulons pas vous donner la possibilité de vous cacher derrière le principe de justice putride et corrompu qui fait de vous des inquisiteurs.
Le fait que soit refusé à nos compagnons de se présenter physiquement dans la salle, que soit ainsi annulé le principe de participation à la défense, garantie par le droit qui soutient le bobard démocratique, est l’énième démonstration du caractère factieux de l’utilisation de la légalité. Par-dessus-tout, pour cette raison nous ne participerons plus à cette farce, désertant les audiences et confiant la défense technique aux avocats cherchant à faire émerger autant que possible les contradictions qui soutiennent ce système, sans justifier notre être et sans revendiquer des miettes de démocratie.
C’est comme ça que nous avons décidé de combattre enfermés dans les frontières de votre loi. En dehors de ces frontières c’est toujours nous qui décidons comment et quand combattre.
Le bon PM Sparagna, champion de la lutte contre la mafia ou chien qui mort la main du patron qui lui donne une miche de pain, a pensé pouvoir combattre les anarchistes comme les mafieux sans se rendre compte que ce qui nous distingue est quelque chose qui va bien au-delà de sa misérable conception de l’existence et de la solidarité. Il pourra donc tenter d’utiliser lâchement le vécu de chacun de nous pour chercher des failles dans lesquelles s’insinuer, mais jamais il n’y arrivera.
Honneur et amour démesuré pour nos sœurs et nos frères otages de l’État.
Champions de la justice : ce qui est à nous ne sera jamais votre, pas même après des années où vous continuerez à espionner et à étudier nos vies.
Coupables d’aimer sans conditions.
Coupables de haïr en toute conscience.
Claudia et Stefano
Déclaration d’Alfredo Cospito
« L’association est ton outil, ton arme, elle aiguise et multiplie ta force naturelle. L’association n’existe que pour toi et par toi, la société au contraire te réclame comme son bien et elle peut exister sans toi. Bref, la société est sacrée et l’association est ta propriété, la société se sert de toi et tu te sers de l’association » — Stirner
« O Gentilhommes, La vie est courte… si nous vivons, nous vivons pour marcher sur la tête des rois » — Shakespeare Henry IV
« Je regrette tous les crimes que dans ma vie je n’ai pas commis. Je regrette tous les désirs que dans ma vie je n’ai pas satisfaits »
Je voudrais être le plus clair possible, que mes mots puissent sonner comme une reconnaissance de culpabilité. Pour autant qu’il soit possible d’appartenir à un instrument, à une technique, je revendique avec orgueil et fierté mon appartenance à la FAI-FRI. Je me reconnais dans l’entièreté de son histoire avec orgueil et fierté. J’en fais partie à part entière et ma contribution porte la signature du « Nucleo Olga ». Je me serais tu si cette farce s’était limitée à Nicolas et moi. Mais vous avez impliqué une part significative de tous ceux qui en ces années nous ont donné leur solidarité, parmi eux les personnes qui me sont le plus chères. Arrivé là je ne peux pas m’abstenir de donner mon avis. En me taisant je deviendrais complice de l’infâme tentative de votre part de frapper dans le tas une partie importante du mouvement anarchiste. Des compagnonnes et compagnons traînés derrière les barreaux et jugés non pas pour ce qu’ils ont fait mais pour ce qu’ils sont : des anarchistes.
Jugés et arrêtés non pas pour avoir revendiqué, comme je l’ai fait moi, une action avec l’acronyme FAI-FRI, mais pour avoir participé à des assemblées, pour avoir écrit dans des journaux et sur des blogs, ou plus simplement pour avoir donné leur solidarité à des compagnons en procès. Je ne me ferais pas le bouclier de ces compagnonnes et compagnons. A une époque où les idées ne comptent pas être arrêtés et jugés pour une idée en dit long sur la force fracassante qu’une certaine vision de l’anarchie continue à avoir, et en dit aussi beaucoup sur la noix creuse que sont la démocratie et les prétendues libertés démocratiques. Vous avez vos raisons, je n’en doute pas, au fond il n’existe pas de bons anarchistes, en chaque anarchiste couve le désir de vous jeter en bas de cette estrade. Aucune tentative de ma part de faire passer la FAI-FRI pour une association récréative ou un club de jeunes marmottes. Ceux qui ont utilisé cet instrument, ou, comme vous direz, à jeun d’anarchie, « ceux qui font partie de la FAI-FRI » le revendiquent à tête haute comme mes frères et sœurs arrêtées dans le passé, comme moi-même il y a quelques années à Gênes et aujourd’hui dans cette aile. C’est notre histoire qui vous l’enseigne, histoire que nous sommes en train de payer par des années de prison et d’isolement dans la moitié du globe, jamais martyrs, jamais rendus. Ceux qui ne font pas partie de cette histoire, traînés enchaînés devant vous, se taisent parfois par solidarité, par affection, par amour, par amitié, des sentiments impensables, incompréhensibles pour vous, serviteurs de l’État. Votre « justice » est la domination du plus fort sur le plus faible. Je vous le garantis, au cours de ce procès vous ne trouverez parmi les inculpés ni lâches ni opportunistes, le prix de la dignité est inestimable et payer ce prix en vaut toujours la peine, et je suis prêt à le payer à tout moment. Cela ne devrait avoir aucune importance pour vous si c’est réellement moi qui ai posé ces bombes. Quoiqu’il en soit je me sens complice de ce fait, comme de toutes les autres actions revendiquées FAI-FRI. L’ensemble des actions dont vous m’accusez ayant été, qui plus est, toutes en solidarité avec des migrants et des anarchistes emprisonnés. Je les partage pleinement. Comment ne pas me sentir complice quand j’ai moi-même utilisé cette acronyme pour définir une méthode. Comment ne pas me sentir complice quand ces explosions ont été pour moi comme des lueurs dans l’obscurité. Aussi absurde que cela puisse vous paraître il existe un avant et un après FAI-FRI pour moi. Un avant, quand j’étais fanatiquement et stupidement convaincu que l’action destructive devait nécessairement parler toute seule, et que tout acronyme était la crotte du démon. Un après où, avec la revendication du tir au pistolet sur Adinolfi, j’ai mis en discussion ces dogmes insurrectionnalistes en arrivant à concrétiser mes nouvelles conceptions dans une action. Peu de choses diront certains, et ce serait vrai si derrière ce simple acronyme il n’y avait pas une méthode qui pourrait réellement faire la différence, pour nous anarchistes de praxis, au-delà et en-dehors de la répression, des répressions au-delà des salles de tribunaux. Aussi limitée qu’ait été ma contribution, malgré que je sois arrivé en retard, je me sens complice en tout et pour tout des frères et des sœurs qui ont commencé ce chemin. Qui qu’ils soient, où qu’ils soient, j’espère qu’ils ne m’en voudront pas si je fais miennes leurs actions, elles me représentent. Peu importe si je ne les ai jamais regardés dans les yeux, j’ai lu leurs lettres de feu, je les ai partagées, j’approuve leurs actions et cela me suffit. Aucune volonté de ma part de me les approprier, plutôt une volonté forte et orgueilleuse de partage de responsabilité.
Juges, j’aurais aimé vous cracher au visage (comme je l’ai fait à Gênes) ma responsabilité directe des faits que vous m’attribuez, mais je ne peux pas m’approprier les mérites et les honneurs qui ne sont pas les miens, ce serait exagéré. Vous devrez, et je devrais aussi, vous contenter de ce que dans votre langage baigné d’autoritarisme vous définirez « responsabilité politique ». Ne désespérez pas, doués comme vous êtes pour inventer des preuves « irréfutables », bien qu’elles soient tirées par les cheveux, pour ressusciter de l’oubli des vieilles enquêtes classées, des ADN stupéfiants tout aussi inconsistants. Vous n’aurez aucune difficulté pour rapporter à la maison un bon butin d’années de prison. Si vous voulez vraiment le savoir, ma condamnation a lieu d’être, ne serait-ce que pour mon adhésion à la FAI-FRI, adhésion à une méthode, non pas à une organisation, sans parler de ma volonté ferme et concrète de vous détruire et de détruire tout ce que vous représentez. Vous avez frappé au hasard les personnes qui me sont le plus chères, ma famille, mes amitiés, tirant à boulets rouges. Les scrupules moraux ne sont pas votre fort, vous avez fait chanter, vous avez menacé, vous avez utilisé l’éloignement des enfants de leurs parents, comme des instruments de coercition et d’extorsion. Vous avez traîné devant vous des compagnonnes et des compagnons qui n’ont rien à voir avec la FAI-FRI avec des accusations et des preuves inexistantes. Une des raisons, pas la principale, de revendiquer FAI-FRI fut de ne pas exposer le mouvement anarchiste à une criminalisation facile. Aujourd’hui je me trouve dans une salle à contester vos représailles, votre tentative mesquine de mettre sur le banc des accusés « Croce Nera », journal historique du mouvement anarchiste qui, depuis les années 60, joue son rôle de soutien aux prisonniers de guerre anarchistes. Dans vos délires fascistoïdes vous tentez de faire passer « Croce Nera » pour l’organe de presse de la FAI-FRI. Même en 1969, en pleine campagne anti-anarchistes, ils n’étaient pas allé si loin. A l’époque, une fois obtenu leur quota de chair humaine avec le meurtre de Pinelli, fondateur de la « Croce Nera » italienne, vos collègues se limitèrent à l’incrimination de certains compagnons pour des faits spécifiques. Nous savons tous comment cela a fini.
Aujourd’hui, en manque de sang, vous ne vous limitez pas aux accusations de 4 compagnons et compagnonnes pour des faits spécifiques, vous allez au-delà, jusqu’à criminaliser une part entière du mouvement. Dans cette optique inquisitoire, tous ceux qui ont fait partie de la rédaction de « Croce Nera », qui y ont écrit ou qui ont simplement assisté à ses présentations publiques, font tous partie de la FAI-FRI. Ma participation orgueilleuse à la rédaction de « Croce Nera » et d’autres journaux anarchistes ne fait pas de ces journaux des organes de presse de la FAI-FRI. Ma participation est individuelle, chaque anarchiste est une monade, une île à part, sa contribution est toujours individuelle. J’utilise l’instrument FAI-FRI uniquement pour faire la guerre. L’usage de cet instrument, l’adhésion à la méthode qui en découle, n’implique pas toute ma vie d’anarchiste, elle n’implique en rien les autres rédacteurs des journaux auxquels je collabore. Une caractéristique de mon anarchie est le polymorphisme des pratiques déployées, toutes bien distinctes. Je ne réponds que pour moi, chacun répond pour soi-même. Cela ne m’intéresse pas de connaître ceux qui revendiquent avec l’acronyme FAI-FRI, je ne communique avec eux que par les actions et les communiqués qui les suivent. Je considère que les connaître personnellement est contre-productif, et je ne vais pas les chercher non plus, encore moins pour faire un journal avec eux. Même ici en prison, ma vie d’anarchiste est bien plus complexe et variée qu’un acronyme et qu’une méthode. Je lutterais jusqu’au bout afin que le cordon ombilical qui me lie au mouvement anarchiste ne soit pas rompu par l’isolement et par vos prisons. Mettez-vous bien ça en tête. La FAI-FRI, sans rien enlever à la contre-information, n’édite ni journaux ni blogs. Elle n’a besoin ni de spectateurs ni de supporters ni de spécialistes de la contre-information, il ne suffit pas de la regarder avec sympathie pour en faire partie, il faut se salir les mains avec les actions, risquer sa vie, la mettre en jeu, y croire vraiment. Même des têtes gangrenées par l’autoritarisme comme les votre devraient l’avoir déjà compris, seuls les frères et sœurs anonymes qui frappent en utilisant cet acronyme et les prisonniers et prisonnières anarchistes qui en revendiquent l’appartenance font partie de la FAI-FRI, tout le reste n’est que généralisation et instrumentalisation à usage de la répression. Je profite de l’occasion que vous me donnez avec ce procès pour m’enlever le bâillon suffoquant de la censure et pour donner mon avis sur des sujets qui me tiennent à cœur, dans l’espoir que mes paroles puissent arriver, au-delà de ces murs, à mes frères et sœurs. Ma « communauté d’appartenance » est le mouvement anarchiste, avec toutes ses facettes et ses contradictions. Ce monde riche et varié dans lequel j’ai vécu les trente dernières années de ma vie, une vie que je n’échangerais avec aucune autre. J’ai écrit dans des journaux anarchistes et je continue à le faire, j’ai participé à des manifestations, des affrontements, des occupations, j’ai fait des actions, j’ai pratiqué la violence révolutionnaire. Ma « communauté de référence » sont tous mes frères et sœurs qui utilisent la méthode FAI-FRI pour communiquer, dans mon cas sans se connaître, sans s’organiser, sans se coordonner, sans céder aucune liberté. Je n’ai jamais confondu les deux plans, la FAI-FRI est simplement un instrument, parmi les nombreux que les anarchistes ont à disposition. Un instrument pour faire la guerre uniquement.
Le mouvement anarchiste est mon monde, ma « communauté d’appartenance », la mer dans laquelle je nage. Ma « communauté de référence » ce sont les individus, les noyaux affinitaires, les organisations informelles (coordinations de plusieurs groupes) qui communiquent, sans se contaminer, à travers l’acronyme FAI-FRI se parlant par le biais des revendications qui suivent les actions. Une méthode qui me donne aussi, à moi, anti-civilisateur, anti-organisateur, individualiste, nihiliste, la possibilité d’unir nos forces avec d’autres individus anarchistes, organisations informelles (coordination de plusieurs groupes), noyaux affinitaires, sans céder notre liberté, sans renoncer à mes tendances et convictions personnelles : je me définis anti-civilisateur car je crois que le temps à notre disposition est très limité avant que la technologie, prenant conscience d’elle-même, ne domine définitivement l’espèce humaine. Je me définis anti-organisateur car je m’inscris dans la tradition anti-organisatrice illégaliste du mouvement anarchiste, je crois dans les rapports fluides, libres entre anarchistes, je crois au libre accord, à la parole donnée. Je me définis individualiste car je ne pourrais jamais, de par ma nature, déléguer pouvoir et décisions à d’autres, je ne pourrais jamais faire partie d’une organisation qu’elle soit formelle ou spécifique. Je me définis nihiliste car j’ai renoncé au rêve d’une révolution future pour la révolte maintenant, tout de suite. La révolte est ma révolution, et je la vie à chaque fois que je m’affronte violemment à l’existant. Je crois qu’aujourd’hui notre tâche principale est de détruire. Grâce aux « campagnes de luttes » de la FAI-FRI je m’offre la possibilité de renforcer mon action, en la rendant plus incisive. « Campagnes de lutte » qui doivent nécessairement découler d’actions appelant à d’autres actions, non pas d’appels ou d’assemblées publiques, en rompant nettement avec les mécanismes politiques d’autorité morale dont les assemblées des mouvements sont pleines. La seule parole qui compte est celle de ceux qui frappent concrètement. La méthode assembléaire est, à mon avis, une arme inefficace pour faire la guerre, inévitable et fructueuse dans d’autres contextes. En adhérant avec mes forces aux « campagnes de lutte » de la FAI-FRI, dans mon cas en tant qu’individualiste ne faisant partie d’aucunes organisations informelles (coordination de plusieurs groupes), je profite d’une force collective qui est quelque chose de plus et de différent que la simple somme mathématique des forces dégagées par de simples groupes affinitaires, individus et organisations informelles. Cette « synergie » fait en sorte que « le tout », la FAI-FRI, soit beaucoup plus que la somme des sujets qui la composent. Tout cela en sauvant son autonomie individuelle grâce à l’absence totale de liens directs, de connaissance, avec les groupes et organisations informelles ainsi qu’avec les anarchistes revendiquant avec cette acronyme. On se donne un acronyme pour permettre aux individus, aux groupes, aux organisations formelles, d’adhérer et de se reconnaître dans une méthode qui sauvegarde d’une manière absolue ses projets particuliers, ceux qui revendiquent FAI-FRI adhèrent à cette méthode. Rien d’idéologique ni de politique, seulement un instrument (revendication par le biais d’un acronyme) produit d’une méthode (communication à travers les actions entre individus, groupes, organisations informelles) qui a pour objectif de renforcer au moment de l’action sans homologuer ni aplatir. L’acronyme est important, il garantit une continuité, une stabilité, une constance, une croissance quantitative, une histoire reconnaissable, mais en réalité la véritable force, le tournant réel, consiste dans la méthode, simple, linéaire, horizontale, absolument anarchiste, à savoir la communication directe par les revendications sans intermédiaires, sans assemblées, sans se connaître, sans s’exposer excessivement à la répression, seuls ceux qui agissent, ceux qui se mettent en jeu par l’action communiquent. La vraie innovation est la méthode. L’acronyme devient contre-productif s’il outrepasse le but pour lequel il est né, c’est-à-dire se reconnaître en tant que frères et sœurs qui adoptent une méthode. C’est tout. La pratique est notre feuille de tournesol, c’est dans la pratique que l’on teste l’efficacité de notre instrument. Il faut prendre conscience que l’expérience FAI-FRI, en perpétuelle évolution, nous met face à des transformations soudaines, chaotiques ; il ne faut pas rester déconcertés. L’immobilisme représente la mort, notre force est l’exploration de nouvelles voies. Le futur de cette expérience n’est évidemment pas dans une meilleure structuration, mais dans la tentative, chargée de perspectives, de collaboration entre anarchistes, groupes affinitaires, organisations informelles, sans jamais se contaminer les uns les autres. Les instances de coordination doivent rester à l’intérieur de l’organisation informelle, entre groupes ou noyaux qui la composent, sans en sortir, sans impliquer les autres organisations informelles FAI-FRI et, surtout, les groupes et les anarchistes FAI-FRI qui autrement verraient leur autonomie minée à la base, de même que leur liberté et le sens même de leur agir en dehors des organisations et des coordinations. Ce n’est que comme ça que si des dynamiques autoritaires se produisent à l’intérieur d’un groupe, d’une organisation, elles resteront circonscrites là où elles sont nées, évitant la contagion. Il n’existe pas un tout unique, il n’existe pas une organisation appelée FAI-FRI, il existe des individus, des groupes affinitaires, des organisations informelles toutes bien distinctes, qui communiquent par le biais de l’acronyme FAIFRI, sans jamais rentrer en contact entre elles. Beaucoup a été dit et écrit à propos des dynamiques internes des groupes d’affinités, sur l’organisation informelle et l’action individuelle. Au contraire, la communication entre ces pratiques n’a jamais été explorée, n’a jamais été prise en considération. La FAI-FRI est la tentative de mettre en pratique cette communication, Actions individuelles, groupes d’affinités, organisations font toutes parties de ces instruments qu’historiquement les anarchistes se sont toujours donnés. Chacun de ces instruments a des avantages et des inconvénients. Les groupes d’affinités associent célérité opérative en raison de la connaissance approfondie entre individus et une certaine puissance due à l’union de plusieurs individus. Ses grandes qualités : la liberté de l’individu garantie et une résistance importante à la répression. Qualités dues à aux nombres restreints d’individus et à la grande affection et amitié qui les lient nécessairement. L’organisation, informelle dans notre cas (coordination de plusieurs groupes), garantie une très grande disponibilité des moyens et des forces, mais une vulnérabilité élevée due à la nécessaire coordination (connaissance) entre les groupes ou les noyaux, qu’un premier soit frappé et on risque l’effet « domino », les autres chutent tous.
De mon point de vue, la liberté individuelle s’affrontera forcément aux mécanismes de décisions collectives (« règle » de fonctionnement de l’organisation). Cet aspect représente une réduction drastique de liberté et d’autonomie, réduction insupportable pour un anarchiste individualiste. L’action individuelle garantie une célérité opérative élevée, une imprévisibilité très haute, une très forte résistance à la répression, et par-dessus tout une liberté totale. L’individu ne doit rendre compte à rien ni à personne, sinon à sa propre conscience. Un grand défaut : la potentialité opérative basse, on a sûrement moins de moyens et de possibilités pour mener des coopérations complexes (choses qu’au contraire une organisation informelle, s’il y a de la volonté et de la fermeté, peut faire avec une facilité certaine). Expérimenter l’interaction entre manières de se mouvoir si radicalement différentes, voilà l’innovation, la nouveauté qui peut déconcerter et nous rendre dangereux. Aucun mélange ambiguë, groupes, individus, organisations informelles, ne doivent jamais rentrer en contact direct. A chacun le sien, les hybrides nous affaibliraient. Lié par une méthode davantage que par un acronyme. La FAI-FRI permet d’unir les forces sans se dénaturer les uns les autres. Aucun moralisme ni dogmatisme, chacun échange librement comme il l’entend, ce sera probablement le mélange de tout cela qui fera la différence. Aucune coordination au-delà de l’organisation informelle (car la coordination inclue la connaissance physique entre tous les groupes et les organisations les rendant perméables à la répression), aucune superstructure homologuée, hégémonique, qui écrasent individus ou groupes d’affinités. Ceux qui expérimentent dans leur propre agir l’organisation informelle ne doivent pas imposer leur manière de se mouvoir au-delà d’elle-même, tout comme les individus d’actions et les groupes d’affinités « solitaires » ne doivent pas crier à la trahison de l’idée si des frères et des sœurs agissent en groupes compacts et organisés. Naturellement ce n’est que mon point de vue. Il vaut ce qu’il vaut. Pour finir en beauté je vous dirais que je pisse sur votre code pénal avec insouciance et allégresse. Peu importe ce que vous déciderez pour mon compte, mon destin restera solidement entre mes mains. J’ai les épaules solides, ou au moins j’ai l’illusion de les avoir, et ni votre prison ni votre isolement ne me font peur, je suis prêt à faire face à vos rétorsions, jamais dompté, jamais rendu.
Longue vie à la FAI-FRI
Longue vie aux CCF
Mort à l’État !
Mort à la civilisation !
Vive l’Anarchie !
Alfredo Cospito
Au tribunal de Turin [Déclaration de Gioacchino Somma]
Aujourd’hui, comme pour toutes les audiences à venir de ce procès dans lequel je suis inculpé avec d’autres de mes sœurs et frères, mais par-dessus tout d’autres compagnons anarchistes, je ne vous donnerai pas la satisfaction de voir mon visage dans la salle de ce tribunal.
Dans le passé je ne me suis jamais présenté dans les salles où on me préparait les funérailles et ce n’est pas maintenant que je le ferai !
Je suis anarchiste, individualiste, anti-autoritaire et par dessus tout je suis pour l’insurrection, dont un des premiers objectifs est celui de détruire les lieux de mort comme celui-ci et les prisons.
Je ne ferais pas partie du petit spectacle monté par un magistrat qui, pris par les crampes de la faim, est devenu salarié d’un État que je ne reconnais pas, étant un citoyen du monde en perpétuelle évasion de ses frontières ; je ne serais pas là pour écouter ses délires et attendre la fin pour écouter quelqu’un me juger « coupable ou innocent ».
Pour n’importe quel État autoritaire je serais toujours « coupable » parce que dans la société que je veux il n’y aura pas d’espaces pour vous, pour vos palais et vos institutions.
Je n’ai aucune envie d’entendre un serviteur de l’État me raconter l’histoire de l’anarchisme, avec pour objectif d’insister sur l’existence de « bons » et de « méchants », juste parce que sa démocratie le lui impose.
Aujourd’hui il demande de nous condamner, demain il sera de nouveau à cours de salaire et demandera à condamner ceux qu’il considère comme les « bons ».
Mais il n’y a qu’une vérité : un anarchiste ne pourra jamais être « bon » pour un État autoritaire.
Autrement je dois penser que durant les années gâchées pour vos foutues diplômes en droit vous n’avez jamais appris les significations des termes que vous utilisez.
Dans un monde où la morale de ses habitants est formée d’un côté par les religions et de l’autre par les chacals de l’ « information » payés par la magistrature ou par les commissariats et les casernes, j’ai trouvé opportun de me trouver un espace sur le web pour la « contre-information ».
Je l’ai fait conscient d’utiliser un moyen à vous.
RadioAzione, dont je suis l’unique fondateur et administrateur, vous a jeté à la figure ce que vous ne voulez jamais entendre.
Votre intention était de laisser démocratiquement cet espace, un bon appât pour attraper les poissons, mais moi je me suis assis dans cet espace et j’ai renversé votre « belle » table.
Si vraiment le site de RadioAzione vous causait des soucis vous pouviez mettre une de vos « belles » censures mais vous ne l’avez pas fait ; peut-être parce que quelqu’un devait écrire des pages et des pages d’actes judiciaires pour gagner des miches de pain pendant quelques années ?
Ou bien parce que pendant six ans vous avez été là pour écouter ou lire mes pensées à travers une foutue key-logger auquel vous avez même donné un nom, « Agent Elena », qui avec ses factures gonflées a donné à manger à un autre serviteur de l’État ?
Mais c’est un autre discours…votre fourberie, qu’il ne m’intéresse pas d’approfondir.
Pour conclure, parce que selon moi je vous ai déjà concédé trop d’espace :
Je revendique le projet RadioAzione comme m’appartenant, à moi uniquement.
Projet sur lequel, depuis qu’il est né jusqu’à ce que je décide de le fermer, j’ai toujours publié mes « réflexions » personnelles et individuelles, ou celles d’autres compagnons dans le monde, que je considère comme affines.
J’ai rendu tout cela lisible à travers le site et écoutable à travers la radio ; par là je ne dis pas que j’ai fait les choses “à la lumière du soleil” mais parce que j’étais conscient que, en plus des compagnons, vous étiez aussi là à écouter et à lire, et quand vous n’en pouviez plus vous en êtes même arrivés à saboter ma ligne téléphonique en coupant les câbles.
Ce ne sont pas ces petits jeux de frustrés qui m’irritent mais votre misérable existence !
Dans le passé vous avez essayé par tous les moyens de m’arrêter : prison, contrôles incessants en domiciliaire, services secrets, infiltrés, etc…
Je suis toujours là !
Jamais un pas en arrière !
Contrairement à vous, j’ai donné un sens et un but à mon existence : la destruction totale de l’État !
Je considère le projet Croce Nera Anarchica comme un projet valide mené par des compagnons dont je me sens en affinité, et cela ne m’a causé aucun problème d’organiser la présentation de leur journal à Naples et encore moins de collaborer à travers les traductions ou la mise à jour du site pendant un certain temps.
Ce ne sera pas l’épouvantail inutile de ce procès qui me fera taire, qui me convaincra de ne pas donner de Solidarité, de Complicité et de soutien économique aux compagnons, frères et sœurs, que vous me privez d’avoir à mes côtés aujourd’hui parce qu’ils sont enfermés dans vos camps et dans ceux du monde entier.
Ce ne sera pas l’épouvantail de vos camps qui me fera faire un millimètre en arrière et supprimera la conviction, qui grandit toujours plus en moi années après années, d’être votre ennemi total, ainsi que d’être l’ennemi de votre existant fétide et opulent et de tout État – Capital !
Pour l’anarchie, pour l’insurrection.
Gioacchino Somma
Fonte :
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fonte : non-fides.fr